Le sauvetage des juifs 1941-1944 (Paul et Suzanne Haering)

Alice et Isidore Ribas

Carmaux 1942
Paul Haering raconte "Un beau matin de mai 1941..."
Suzanne mon épouse
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Le couple Ribas
Rafle à Carmaux - Août 1942 !
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Face à la situation d'urgence de ce printemps 1941, Les pasteurs Paul Haering et Albert Delord firent un appel à la communauté protestante de Carmaux pour venir en aide aux familles de réfugiés juifs.

Parmi ces volontaires, le couple Alice et Isidore Ribas qui cachèrent 4 fillettes juives.

Voici le témoignage de l’une d’elles : Régine Pidhorz. Elle fut confiée aux Ribas sur les conseils du Pasteur A. Delord.

Il existe deux témoignages que Régine écrivit à deux époques différentes (2005 et 2009). Nous proposons également celui de Louis (son frère) qui avait l'occasion de voir sa sœur de temps-en-temps.

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PHOTOS: ARCHIVES FAMILIALES D'ALEXANDRE SIGAL, FILS DE REGINE.

 

2005 - Rédation du premier témoignage de Régine Pidhorz en faveur d’Isidore et Alice Ribas :

 

Je soussignée Régine Pidhorz, épouse Sigal certifie les faits suivants : Mes parents sont originaires de Pologne.

Papa est né le 26/12/1907 à Lwow. La sœur de Papa a permis son immigration en France motivée par l’antisémitisme et la pauvreté. Je peux situer la première activité de papa en 1933. J’ignore pourquoi la famille s’appelait Pidhorz ou Gruber. J’ignore la date exacte de l’arrivée de maman en France, également motivée par l’antisémitisme.

Maman est née Chaja Sura Kurland le 15 août 1908 à Klobuck. Elle a d’abord été hébergée chez son frère Ignace Sygelbaum au 245 rue de Bercy à Paris.

Mes parents se sont mariés le 11 janvier 1936 à Paris. Ils ont vécu en Lorraine à Piennes. La dernière patente de leur fond de commerce était encore valable pour 1940. Leur magasin a été fermé le 15 mai 1940.

Papa s’est engagé volontaire israëlite. Maman est partie avec mon frère et moi probablement en novembre 1940 afin de se rapprocher de  papa.

La famille a vécu au 36 avenue Jean Jaurès, à Carmaux. Sur le livret de famille de mes parents, je trouve trace d’une carte de priorité n°164 délivrée le 10/09/1941 à Carmaux.

J’étais trop jeune pour me souvenir de Mr et Mme Ribas qui m’ont hébergée pendant une partie de cette époque. Maman m’a parlé du Pasteur Delord, nommé Juste en 1985 qui a permis mon placement chez ce couple qui n’avait pas d’enfants et qui ont risqué leur vie pour moi et pour deux autres petites filles juives également (que je n’ai pas connues).

Dans la maison jumelle du 11 rue des saules à Carmaux où j’étais, vivait la famille de Mme Ribas. Ce sont les enfants de Mr et Mme Maurel, c'est-à-dire Aline et Jacques Maurel qui me servent de témoins.

Pour Aline Maurel et l’entourage, j’étais une petite fille venue à Carmaux par l’intermédiaire de Pasteurs pour être mieux nourrie et à l’abri.

Pour mon frère, j’étais considérée comme la petite fille de Mr et Mme Maurel.

Je garde un excellent souvenir de mon passage et de l’accueil de Mr et Mme Ribas. Mes parents ont témoigné leur reconnaissance en entretenant une correspondance régulière et je les ai tenus moi-même au courant de l’évolution de ma vie. J’ai passé quelques semaines à Carmaux en août 1954. J’ai trouvé un couple absolument adorable, dévoué, respirant l’honnêteté.

Je me souviens être allée au Temple protestant dans mon jeune âge. Mr et Mme Ribas auraient sauvés trois petites filles (nous n’étions pas ensemble) dont une petite Ruth.

Maman m’a raconté que les rares fois où nous nous voyions aboutissait à une pénible séparation.

Je pensais que la correspondance que nous avions entretenue était la preuve de l’amour que j’ai continué à porter à Mr et Mme Ribas.

Mais à ce jour, je serais heureuse de leur rendre hommage à titre posthume en leur obtenant la médaille des Justes.

Je me souviens avoir éprouvé de la jalousie envers mon frère ne comprenant pas pourquoi il avait passé une partie de l’exode avec lmes parents, et pourquoi j’avais été placée dans une famille.

Maman m’a rassurée en m’expliquant que mon frère était plus âgé, et qu’il était plus facile pour mes parents de se sauver ou de se cacher avec lui. J’étais trop jeune pour cette partie de cache-cache.

Je conserve un souvenir plus précis même à mon âge de la rue Jean Jaurès à Carmaux où nous étions. Je me souviens du bruit des bottes des allemands dans la rue, des alertes (sirène), de maman et moi blotties derrière les volets fermés, assistant à l’arrestation d’amis de mes parents (Les Hacker me semble-t-il).

Je vous remercie de  l’attention que vous voudrez bien accorder à ce dossier, et prie d’agréer l’assurance de mes sentiments les meilleurs.

 Fait à Paris, le 15.02.2005

 Régine Sigal

 
 
 
 
2009 -  Rédaction du second témoignage de Régine Pidhorz en faveur du couple Ribas :

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2005 - Témoignage de Louis Pidhorz en faveur d’Isidore et Alice Ribas :

Je soussignée Pidhorz Israël Louis, certifie les faits suivants :

Avant la guerre, mes parents, domiciliés Gde rue à Piennes (54), exerçaient la profession de commerçants.

Mon père, en France très probablement depuis les années 1932 – 1933 avait débuté par être marchand ambulant toujours dans la même branche  de confection (immatriculation du 19.07.1933 à Briey - 54 - et registre du commerce du 24/07/1933).

Après son mariage le 16.01.1936 (Paris XII°), il devait créer un magasin de confection, bonneterie, chapellerie et vente de fourrures (registre du commerce du 28.06.1938 de Briey et déclaration modificative du 01.06.1938). Ce magasin dénommé « Aux galeries Henri » se situait rue principale ou gde rue à Piennes. Notre appartement était loué à Mr et Mme Fehrembacher. Son activité était prospère.

Deux enfants devaient naître de cette union : moi-même le 11.09/1937, et ma sœur Régine le 29.02.1940.

La fermeture de ce magasin devait survenir le 09 ou 15 mai 1940, et mon père s’negageait dans l’infanterie à Bar-le-Duc. Il devait être démobilisé le 14.08.1940 à Septfonds, canton de Caussade.

La proximité de Carmaux explique que ma mère devait habiter au 34, puis au 38 rue Jean Jaurès, ainsi que les documents de démobilisation et plus tardivement la déclaration de réouverture du magasin à Piennes en juillet 1945 en attestent.

En ce qui me concerne, les deux enfants que nous étions, nous étions cachés avec un groupe d’enfants juifs près de Châteauroux (sous le couvert de l’OSE ou de l’UGIF). Je fais des recherches actuellement pour localiser cet endroit.

Profitant d’une visite de notre mère, nous avons quitté Châteauroux fin 42 pour rejoindre Carmaux.

Jusqu’à la fin de la guerre mon père s’est caché, travaillant soit à la mine, soit dans les vignes proches. Ma sœur Régine a été cachée par une famille protestante Mr et Mme Ribas pour une période prolongée.

Durant ces sombres années, rafles et dénonciations ont émaillé le cours de la vie de cette petite ville nous obligeant maman et moi à nous cacher fréquemment et m’empêchant (obligeant ?), ainsi qu’en atteste le cahier de notes mensuelles que je possède, à manquer les cours à l’école Victor Hugo durant de longue périodes.

La maison des Ribas, auquel était attenant un petit jardin, se situait selon mon souvenir derrière une grande avenue perpendiculaire à notre rue Jean Jaurès, dans un environnement pavillonaire.

La maison et la famille Ribas étaient accueillantes. Régine était considérée comme leur petite fille, elle était heureuse, propre, très bien habillée et bien nourrie. Elle n’a jamais mentionné la moindre critique à leur égard, appelant même Mme Ribas « tantine », qualificatif qu’elle devait garder de nombreuses années, même après notre retour à Piennes en juillet 1945.

Je me souviens que nous allions avec maman voir ma sœur, très rarement, toujours brièvement, et qu’on m’avait appris depuis notre arrivée dans la ville à ne jamais dire qu’il s’agissait de ma sœur.

Régine faisait véritablement partie de cette famille et n’a jamais eu à souffrir d’un quelconque prosélytisme de leur part.

Pendant de nombreuses années, après notre retour en Lorraine, mes parents ont envoyé des présents à cette famille pour les remercier de l’aide inestimable qu’ils nous ont apportée au péril de leur vie.

Certificat établi pour servir et valoir ce que de droit, le 15.02.2005

L. Pidhorz

ARTICLE PARU DANS LE JOURNAL "LA DEPECHE DU MIDI"
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